Mon accompagnement sexuel : Bénéfices rapides et points négatifs avec le recul


Article / lundi, octobre 28th, 2019

Entre la connaissance de la pratique et ma décision d’y avoir recours, il m’aura fallu une dizaine d’années. 10 ans qui m’auront permis de me sentir prête à faire appel aux services sexuels de quelqu’un sans souffrir d’un attachement/détachement.

J’ai toujours été très emballée par l’accompagnement sexuel et j’ai toujours trouvé un écho qui faisait appel à des valeurs personnelles dans lesquelles je me reconnaissais. Obtenir l’aide de quelqu’un pour découvrir son corps quand on ne peut pas le faire par soi-même.

Je suppose que j’ai également tant attendu car je gardais au fond toujours l’espoir d’y arriver autrement. Et puis les années ont passé, je me suis intéressée à la sexualité, j’ai intégré la première association française à défendre la pratique, j’ai participé à des conférences, animé des débats, toujours dans l’optique d’ouvrir les mentalités à l’accompagnement sexuel auquel je croyais fortement. Et pourtant personnellement, rien n’avançait dans ma vie intime et sexuelle. Rencontre après rencontre, essai après essai de sites de rencontre, discussion après discussion, personne n’avait envie de coucher avec moi.

Et puis un matin, en souffrant tellement de ce manque de contact, et me sentant presque totalement prête à ne pas m’attacher, je décide de passer le cap et je contacte un escort par le biais d’Internet. J’essuie un premier refus, catégorique sans explication. Je cherche encore et me retrouve de nouveau face à quelqu’un qui me dit non, en ayant tout de même le mérite d’argumenter qu’il avait trop peur face à une personne en situation de handicap physique comme le mien. Un peu en colère, j’essaye un dernier. Le couperet tombe une troisième fois et ma fureur se transforme en grosse tristesse de voir que même les travailleurs du sexe ne veulent pas de moi.

Je fais alors appel à l’APPAS qui me met en contact avec un accompagnant formé, qui était pour le coup également escort. J’ai suffisamment parlé de cet accompagnement et je n’y reviendrai pas. Je préfère, quatre ans après, me concentrer sur les bénéfices que j’ai ressentis immédiatement à la suite et les points négatifs que je ressens maintenant.

Tout de suite après, je me suis sentie exister. J’ai surtout été extrêmement soulagée de voir que mon cerveau faisait toujours cette différence entre le toucher de tous les jours par mes aidants et le toucher plaisir d’un homme venu me faire du bien. Je crois que cela a été le principal avantage de mon accompagnement. Me rendre compte que je n’étais pas qu’un cortex !

Me suis-je sentie différente lorsque j’abordais d’autres hommes ? Je ne pourrais pas vraiment le dire mais il est vrai qu’à chaque discussion je partais avec un point de plus, celui d’avoir connu un minimum de relations intimes, ce qui me faisait remonter dans la balance de la normalité des personnes de mon âge.

Quelques mois plus tard, j’ai fait la rencontre d’un homme, qui est devenu mon ami, car il n’a pas souhaité aller plus loin… Le schéma recommençait mais j’avais tout de même davantage l’impression que cette fois-ci cela ne venait vraiment pas de moi, ce qui n’était pas le cas auparavant où tous les blocages avaient une part de responsabilité dans le non avancement de mes rencontres !

Je suis de nouveau repartie dans une vie sans sexualité et j’ai petit à petit été déçue de n’avoir pas connu ma première pénétration avec mon accompagnant qui, et je ne le blâme pas, n’a pas eu d’érection sur demande à ce moment-là.

Le temps a encore passé, et je ressentais presque de la honte d’avoir dû passer par cette méthode pour connaître les caresses, quand d’autres dans la même situation que moi y arrivaient assez bien, voire très bien, avec des partenaires rencontrés normalement ! L’accompagnement sexuel a eu à cet instant l’effet inverse recherché. Je ne me suis plus sentie dans la normalité et cela me faisait soudain finalement beaucoup souffrir.

Cependant, j’ai continué à croire à l’utilité de cette pratique en militant dans l’association jusqu’à rencontrer mon compagnon actuel qui faisait la formation pour devenir lui-même accompagnant sexuel et qui a craqué pour moi au moment où je témoignais de mon histoire et de ma déception face à l’incapacité de mon accompagnant à bander.

Je suis alors passée du statut de la bénéficiaire de l’accompagnement sexuel à celui de la compagne d’un accompagnant sexuel. Et là, tremblement de terre dans mon cortex ! Moi qui ai tant défendu cette pratique, je me retrouve à ne pas supporter que mon homme puisse être l’accompagnant d’une autre femme. Me sentant en complète contradiction avec mes propres discours, j’ai accepté la situation pendant plusieurs mois en essayant de me convaincre qu’il était parfaitement possible de concilier vie de couple et accompagnement sexuel. J’étais en train d’apprendre sur moi-même.

C’est en me voyant souffrir de plus en plus, que mon compagnon a pris la décision d’arrêter de pratiquer l’accompagnement sexuel, car si lui arrivait bien à gérer cette situation, ce n’était absolument pas mon cas et le temps n’arrangeait rien. J’ai fini par accepter que ce n’est pas parce que vous avez défendu une pratique hors couple que vous êtes capable de la supporter au sein du couple.

On ne connaît vraiment ses valeurs propres que lorsque l’on a vécu des situations concrètes. Je ne regrette absolument pas d’avoir fait appel à un accompagnant sexuel et je pense qu’il a tout de même permis certaines prémices de déblocage en moi, évidemment infimes par rapport à ce que l’amour peut m’apporter. Je suis toujours convaincue que l’accompagnement sexuel est malheureusement la seule solution pour certains de connaître un minimum de vie intime et sexuelle. Mais aujourd’hui, j’ai nuancé mon discours et je suis capable de davantage comprendre les opposants à cette pratique ou au moins de mieux les écouter. L’accompagnement sexuel n’est pas simple dans sa seule décision d’y avoir recours et peut être d’une violence absolue, que l’on se fait pour se sauver d’autre part !

Je pense maintenant qu’il faut travailler sur la propre vision de soi-même et de l’estime personnelle dès la plus tendre enfance d’un être en situation de handicap, avec les parents qu’il faut aussi éduquer car sans le vouloir, ils sont eux-mêmes vecteurs de nombreux blocages chez leurs enfants ! C’est d’ailleurs vers cela que je veux me diriger, la formation de toute personne entourant un individu en développement.

Arrêtez de nous faire ressentir que nous ne pourrons pas connaître et nous n’aurons pas le droit à une vie affective et sexuelle. En pensant nous protéger, vous nous faites encore plus de mal en nous maintenant dans cette image de rejet, dont le miroir ne fait que nous en convaincre !

Sur ce, je vais préparer mes prochaines formations pour adolescents et parents, dans la bienveillance, en ayant le grand espoir qu’en changeant certains comportements professionnels et familiaux, l’accompagnement sexuel ne soit plus nécessaire !

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